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© Marie Planchard

Découvrir Yor… Interview…
“Yor”, c’est votre vrai nom ou un nom de scène ?

Ce n’est pas un nom de scène et encore moins un pseudonyme. Pseudo veut dire faux. Un pseudonyme est donc un faux nom. Yor est plutôt un surnom que m’a offert le fils d’un ami qui, lorsqu’il avait 2 ans, n’arrivait pas à prononcer mon prénom d’état civil, Georges. Yor est donc un cadeau, un nom que j’aime : un “philonyme”. Et depuis 20 ans, bien avant mon retour à la scène, tout le monde m’appelle ainsi.

Votre retour à la scène ?
Oui, j’ai commencé à faire des concerts à 17 ans. Puis j’ai enseigné la guitare et je me suis retrouvé dans la peau d'un musicien sans l’avoir vraiment choisi. J’ai d’ailleurs laissé tomber la musique au profit de l’enseignement et du théâtre. Et il y a une dizaine d’années, je me suis fait agresser, je me suis retrouvé à l’hôpital pour m’entendre dire que je n’avais rien de cassé, mais que j’avais des traces bizarres dans le cerveau, qui semblaient être des métastases. À ce moment-là, je me suis posé la question de ce que j’avais vraiment envie de faire avant de partir. La réponse fut évidente : de la musique. Au moment où je pensais mourir, la musique m’a donné envie de vivre. Comme entretemps j’avais été enseignant et comédien, je ne me voyais pas m’exprimer uniquement à travers des notes. J’ai voulu donner la parole à la musique, je me suis mis à écrire des chansons… Et finalement, les médecins m'ont annoncé qu'ils s'étaient trompés, que je n'avais rien et que j'allais pouvoir faire plus qu'un dernier concert…

Comment décririez-vous votre style musical ?
J’aime la musique… les musiques. Je vais puiser dans tous les styles qui peuvent servir mon propos. Les mots et les notes, le verbal et le non-verbal sont au service du sens que je veux transmettre. Je n’ai donc pas de style particulier, mais j’aime quand ça “groove”. Le rythme est fondamental pour moi, dans la musique et dans les paroles. J’aime faire danser et chanter les mots, faire danser et chanter les cœurs. Et puis j’aime créer des liens, des ponts entre les gens et aussi entre les cultures… J’adore les métissages y compris dans la musique.
 
Des articles de presse, dans le magazine Happinez notamment, vous présentent comme le poète et musicien Orphée qui descendit aux Enfers avant de remonter à la surface de la Terre ? Cela vous parle-t-il ?
J’ai perdu en quelques années les figures fondamentales du lien, avant qu’on ne m’annonce que c’était moi le prochain sur ma liste noire. Et je vis mon retour à la chanson comme une résurrection. Alors, oui, ça me parle, même si j’ai toujours du mal avec les définitions. Je ne me vis ni comme un musicien ni comme un poète, je fais de la musique, j’écris des textes, et j’essaie d’incarner le plus possible les notes et les mots que je chante.

En écoutant vos textes, on vous sent concerné en priorité par le thème du lien…
J’ai longtemps pensé que je n’écrivais pas de chansons d’amour. Aujourd’hui, je pense que je n’écris que des chansons d’amour, c’est-à-dire de lien. D’ailleurs la chanson est un formidable outil pour en créer. C’est un accélérateur d’ouverture d’âme… La meilleure définition de l’âme, c’est un luthier qui me l’a donnée. L’âme d’un violon est une petite pièce de bois qui permet à la table d’harmonie de résister à la pression et qui augmente sa capacité à vibrer.

Certaines de vos chansons comme Fous-toi la paix ou Djo guido sont très “à fleur de peau”. On perçoit une hypersensibilité, dont vous parlez d'ailleurs dans les magazines Psychologie Positive et Chemins, mais sans pathos. Qu’en pensez-vous ?
Je pense avoir mis un couvercle sur mon hypersensibilité pendant des années. Composer, écrire et chanter m’ont permis de le faire sauter. Donc hypersensible, oui, je me vis comme tel. Si j’arrive à toucher sans verser dans le pathos, alors j’aurai probablement réussi quelque chose. Je ne cherche pas à émouvoir, je cherche à faire vibrer. C’est peut-être d’ailleurs ce qui me permet d’éviter de tomber dans certains panneaux.

Malgré tout, on sent que vous vous autorisez quelques sorties “légères”. On pense notamment à des chansons comme La tournée des grands ducs, Le hardeur ou bien encore la plage fantôme de votre album. Vous ne craignez pas que des titres comme ceux-ci desservent vos chansons plus sérieuses ?  
Je crois que même dans le sérieux, je ne suis pas sérieux. Mon humour, mon décalage, ma distance sont plus visibles dans ces chansons que vous appelez “légères”, mais sont tout aussi présents dans celles qui le sont moins. Je ne suis pas un hardeur, c’est un peu Fous-toi la paix la nuit !
[éclats de rire…]

 

Pour finir, pouvez-vous nous parler de chacune des quatorze chansons qui composent Maintenant ?
Maintenant
Ce morceau a donné son nom à l'album... J'adore le mot maintenant, main-tenant. Pour moi, c'est l'un des plus beaux mots de la langue française. Lorsque je me suis installé dans le Sud de la France, je me suis assis sur ma terrasse pour la première fois et je me suis dit :
«
Là, je suis bien ». J'ai pris ma guitare et j'ai composé cette chanson...

Djo guido
En improvisant avec des musiciens peuls, j'ai trouvé la mélodie de cette chanson. J'ai demandé à l'un d'entre eux de me dire quelque chose dans sa langue. Il m'a dit «
djo guido, djo guetedo » qui signifie “soutiens qui te soutient”. J'ai immédiatement pensé à ma mère qui m'a soutenu inconditionnellement toute ma vie et j'ai écrit...

Fous-toi la paix
Je parlais avec un ami. Le prototype de l'ami que tu vas voir quand tu ne vas pas bien... Mais ce soir-là, c'est lui qui a craqué complètement. J'étais désarçonné. Je l'écoutais et je voyais toutes les pressions qu'il se mettait sur les épaules. À un moment donné, presque malgré moi, je lui ai dit :
«
Fous-toi la paix ». En voyant l'impact que cette phrase a eu sur lui, je suis rentré chez moi et cette chanson est sortie de ma plume...

Je ne suis pas un hardeur
La torture de la comparaison, et donc de la compétition, sur le plan intime... Mis à part qu'on peut faire l'amour le jour, je maintiens que c’est
Fous-toi la paix, la nuit !

Je suis parce que nous sommes
Je suis parce que nous sommes, c'est le titre de mon livre paru aux éditions Ipagination. J'y raconte l'histoire de cette chanson et pourquoi la philosophie Ubuntu m'a autant marqué.

La tournée des grands ducs
Je voulais écrire une chanson “trash” de “cul”… et je n'ai pas réussi. Il faut croire que je préfère l'allusif et le suggestif... Cet homme va rater l'amour qui était à portée de main à cause d'une femme trop accessible et d'une autre trop inaccessible...

Émerveille-toi
Deux figures m'ont inspiré ce “vieil homme enfant”... Les deux ont quitté ce monde. Les deux m’ont transmis leur enthousiasme lors de notre dernier repas. L'un d'entre eux, Ricet Barrier, avait écrit 22 chansons pour les Frères Jacques et faisait la voix du Canard Saturnin... C'était un gosse, même à la fin de sa vie... un vrai gosse.

 

Ma divine comédie
Jouer... Le mot a mauvaise presse. Pourtant quand je dis jouer, je vois immédiatement un enfant qui joue. Un enfant qui imagine, qui invente, qui crée, qui le fait exister, son coin de paradis... Georges Bernard Shaw écrivait : «
Ce n’est pas parce qu’on vieillit qu’on arrête de jouer, c’est parce qu’on arrête de jouer, qu’on vieillit ».

Prière
J'adore Brel... J'ai imaginé lui parler en utilisant ses mots...

Légalisons l’intelligence
Je m'amuse dans une conférence à incarner un docteur en “conologie”, la science qui étudie les cons. Ce “conologue” démontre qu'un vrai con est celui qui exclut, rejette, prend les autres pour des cons...
Légalisons l'intelligence est une extension de Je suis parce que nous sommes...

Le clown
J'ai toujours voulu faire bonne figure face au pire. Tant et si bien que j'ai souvent eu l'impression d'être un clown avec un sourire peint sur mon visage…

Il était une fois
Depuis toujours, lorsque quelqu'un me dit qu'il a une grosse place dans je ne sais quelle entreprise ou qu'il possède je ne sais quelle grosse voiture, je ne peux pas m'empêcher de me murmurer en mon for intérieur : «
Et alors ? » Le meilleur remède à cet “et-alors-isme”, c'est : il était une fois ! Là, j'ai les yeux qui s'écarquillent, et le cœur qui brille...

Le français
J'ai été enseignant, comédien, chanteur... Tout ce que j'ai fait dans ma vie, je l'ai fait en parlant. J'aime les mots... Je me sens appartenir à une langue... J'y ris, j'y pleure, j'y vis...

À tous les temps
C’est une demande d’un enseignant. Faire une  chanson  qui parle de grammaire. C’est d’ailleurs le premier titre de la chanson,
La grammaire de l’amour. Je me suis amusé à décliner sujet, verbe, complément, temps, mode… Certaines de mes chansons servent d’ailleurs à l’apprentissage du français, notamment la chanson Le français a été transformée en exercice sur TV5Monde.

La plage fantôme
Je vous laisse la découvrir…